Sectes – L’allégorie du berger revue et corrigée – 2. ̷₄

Sommaire de cette série

2 – Une nouvelle représentation :
le modèle de la bergerie

Quand au mouton bêlant la sombre boucherie
Ouvre ses cavernes de mort,
Pâtres, chiens et moutons, toute la bergerie
Ne s’informe plus de son sort. (…)

André Chénier, Ïambes

Voilà des décennies que l’on représente le rapport entre un gourou et ses adeptes par l’allégorie du berger. Au-delà du lieu commun, cette représentation simpliste présente trois défauts majeurs :

• elle crée une dichotomie stricte : dans une communauté religieuse, on est soit berger, soit mouton ;
• elle tend à considérer tous les bergers sur un pied d’égalité, d’un groupe religieux à un autre (qu’il soit ou non dangereux) ; alors que tous les chefs de communauté religieuse ne se valent pas ;
• elle ne fait aucune distinction parmi les adeptes, quels que soient leur rôle, leurs activités et leurs comportements au sein du groupe.

Il s’avère donc essentiel de modifier le modèle du berger afin qu’il puisse donner une vision plus nuancée des organisations religieuses et mieux rendre compte de leur éventuel degré de dangerosité.

Depuis quelques années, dans les (rares) conférences que je donne sur le sujet, j’utilise une représentation sensiblement modifiée, que j’ai intitulée le modèle de la bergerie.

Le premier changement majeur consiste en l’introduction d’un personnage intermédiaire : le chien de berger.

La structure hiérarchique pyramidale de l’organisation apparaît ainsi clairement :

• Le berger donne ses instructions pour conduire le troupeau de moutons (lesquelles instructions prennent la forme d’un rouleau de parchemin : c’est le dogme de l’organisation). Le berger peut d’ailleurs être un collectif de bergers…
• Les chiens exécutent ces instructions ; ils représentent l’indispensable strate des cadres de tout groupe religieux, qui sont au contact direct des moutons/simples adeptes.
• Les moutons suivent les instructions.

Second ajout au modèle traditionnel, les différents personnages peuvent chacun prendre trois états différents, selon les situations étudiées :

Nous verrons dans la prochaine partie comment le modèle de la bergerie permet :

• de dresser un portrait simplifié mais nuancé d’une organisation religieuse donnée,
• d’objectiver les distinctions entre une église ordinaire, une église radicale et une église malveillante.

3 – Églises radicales et églises malveillantes >>>

Images : M. Turan Ercan (chien, loup), Gira Park (mouton), Zach Harris (berger)