Scanneurs à liquides dans les aéroports : un double gaspillage

Airplane!Quand le sage montre la lune,
l’imbécile regarde le doigt.

Proverbe chinois

En 2006, les autorités britanniques découvraient un complot de jihadistes affiliés à Al-Qaïda, visant à faire exploser en vol une dizaine d’aéronefs de transports de passagers au départ de Londres, à destination des États-Unis et du Canada. Les terroristes prévoyaient de monter à bord des bombes à base d’explosifs liquides, non détectables en tant que tels par les scanneurs à bagages de cabine.

L’événement plongea aussitôt le landerneau de la sureté aérienne dans la consternation. [La menace des explosifs liquides existait alors déjà depuis douze ans, mais bon, passons…]

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Bris de sureté à l’aéroport de Brisbane – La gestion du risque niveau zéro

Aviation civileTous les professionnels de la sûreté de l’aviation civile vous le répèteront : le risque zéro n’existe pas. Tous vous le martèleront : il faut adopter une approche de gestion du risque. Problème : tout le monde le dit mais (presque) personne ne le fait.

Cette semaine, à l’aéroport international de Brisbane (Australie), s’est produit un bris de sûreté qui a conduit à faire sortir de la jetée 2 000 (deux mille !) passagers et à tous les faire passer une nouvelle fois au contrôle préembarquement. La raison de ce branle-bas de combat : une paire de ciseaux, aperçue trop tard au scanneur dans le bagage à main d’un passager.

Y avait-il vraiment besoin de perturber ainsi les opérations aéroportuaires et de nuire à ce point :

  • aux 2 000 passagers déjà dans la jetée,
  • aux centaines de passagers qui devaient y accéder au cours des prochaines heures,
  • et aux centaines de passagers bloqués dans les avions qui venaient d’atterrir ?

Pour moi, la réponse tient en trois mots : non, non, non.

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Assaut du poste de pilotage : une vidéo de désinformation massive

Aviation civile

Installer une barrière secondaire pour sécuriser l’ouverture de la porte du poste de pilotage est une option intéressante. Mais elle doit être évaluée sérieusement, selon une approche de gestion du risque. Non pas à l’aune de vidéos sensationnalistes volontairement trompeuses.

La semaine dernière, le landerneau de la sureté du transport aérien américain était en émoi. Une reconstitution filmée – avec figurants, dans un avion au sol, sans passagers – montrait qu’il était possible de prendre d’assaut le cockpit d’un avion de ligne. Et ce, malgré le renforcement de la porte du poste de pilotage – mesure instaurée en occident sur tous les avions de transport commercial de passagers au lendemain du 11-Septembre.

Les deux individus interprétant les assaillants n’ont pas défoncé ou déverrouillé ladite porte. Ils ont profité d’une faille dans la procédure de sureté concernant l’ouverture de la porte durant le vol. Entre le moment où la porte du poste de pilotage s’ouvre et celui où elle se referme sur l’un des assaillants, il s’est écoulé moins de 2 secondes !

Effrayant, non ? Eh bien… non.

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La loi américaine sur les armes à feu indétectables rate sa cible | 0/3

Aviation civileIntroduction

Cette semaine, le Congrès américain a reconduit à l’identique, pour dix ans, la loi prohibant les armes indétectables (Undetectable Firearms Act), votée en 1988 pour une durée déterminée – et régulièrement renouvelée depuis.

À l’origine, ce texte avait pour objectif d’empêcher d’éventuels terroristes d’introduire de telles armes à bord des avions de ligne pour en prendre le contrôle. Des fabricants d’armes tels que Steyr Mannlicher et Glock avaient en effet produit des pistolets en polymère. Selon la rumeur – alimentée par une fameuse (et malencontreuse) réplique de Bruce Willis dans Die Hard 2 -, ces armes pourraient tromper les systèmes traditionnels de détection.

guillemet_mcclaneThat punk pulled a Glock 7 on me. You know what that is? It’s a porcelain gun made in Germany. Doesn’t show up on your airport X-ray machines, here, and it cost more than you make in a month.

Bien que les preuves formelles de cette assertion fassent défaut, les pouvoirs publics américains ont pris la chose très au sérieux. Et les attentats du 11-Septembre n’ont rien fait pour les rasséréner.

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Les couteaux de poche ne doivent pas être autorisés en cabine. – [0/3]

Aviation civileSuite à des pressions de politiciens et de professionnels de l’aviation civile, la Transportation Security Administration (TSA) a finalement décidé de maintenir « temporairement » l’interdiction des couteaux de poche dans les cabines des avions de transport commercial. On ne peut que s’en réjouir. « Temporairement ».

Les États-Unis vivent depuis quelques semaines sous le règne du séquestre budgetaire (Budget sequestration), autrement dit des coupes drastiques qui touchent tous les secteurs publics au fédéral. Fin février, l’analyste Justin Hienz estimait :

guillemet_Le sequestre se révèle en fait une opportunité pour la TSA d’abandonner son obstination à vouloir contrôler tous les passagers des lignes aériennes – ce qui exige des ressources et une main d’oeuvre considérables– et de la remplacer par une approche plus efficiente et plus efficace.

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Quand l’absurdité de la No-Fly List américaine cache une inquiétante pratique policière

À première vue, il s’agit là d’un nouvel avatar de la désastreuse gestion de la No-Fly List aux États-Unis. Mais à y regarder de plus près, la mésaventure de Wade E. Hicks Jr, à Hawaï, il y a deux semaines, va bien au-delà et met en évidence un dangereux dérapage policier. Dérapage qui s’appuie sur cette fameuse liste d’interdiction de vol pour brider les libertés individuelles des citoyens américains, voire des voyageurs étrangers qui souhaiteraient se rendre aux États-Unis.

Ainsi, le 14 octobre dernier, ce citoyen américain de Gulport (Mississipi) décollait de San Francisco sur un vol affrété par l’armée. Sa destination finale : Okinawa, pour rendre visite à sa femme, lieutenant de la Marine américaine, en poste dans l’archipel japonais. À l’aéroport d’Oahu (Hawaï), où l’avion a fait escale pour ravitaillement, M. Hicks se voit refuser le droit de remonter à bord. La raison avancée par l’agent de l’Immigration and Customs Enforcement (ICE) est sans appel : Wade Hicks figure sur la No-Fly List.

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ACE, un projet de prédictions statistiques en renseignement

Par Amotz Brandes

Version originale : « ACE » – chameleonassociates.comhttp://ow.ly/eaoLn

Traduit de l’anglais (américain) par AP

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L’IARPA (Intelligence Advanced Research Projects Activity) est en quelque sorte le cousin en renseignement de la DARPA [Defence Advanced Research Projects Activity – NdT]. L’un de ses projets d’étude, baptisé ACE (Aggregative Contingent Estimation) entre dans sa deuxième année (il est prévu pour durer 4 ans). L’idée fondamentale de ce projet est que, via les statistiques, on peut accroitre la crédibilité d’une prédiction relative à un grand événement (comme un changement de régime politique ou une attaque terroriste), dès lors que cette prédiction implique un grand nombre d’analystes. Est-ce que les opinions ainsi agrégées de milliers d’analystes issus de 17 agences peuvent alerter ou prédire des événements globaux et ce, de façon plus précise que ne le ferait une poignée d’analystes super-pointus ? Ce sont de telles stratégies d’externalisation ouverte [crowdsourcing – NdT] que l’IARPA met à l’épreuve, à des fins de sécurité nationale.

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Non, le profilage de sureté ne doit pas être du profilage racial

De toutes les mesures de protection de l’aviation civile, le profilage est décidément la plus mal comprise. Dès qu’un politicien ou un journaliste se penche sur la question, le terme est encore et toujours synonyme de « profilage racial ».

Cette incompréhension majuscule offre diverses déclinaisons. Par exemple, depuis plusieurs années, resurgit régulièrement une théorie saugrenue selon laquelle le profilage racial aurait parfaitement sa place dans les systèmes de sûreté de l’aviation civile des pays démocratiques.

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