Qu’est-ce que le renseignement ? – 8ème partie

par Kristan Wheaton

Version originale : Sources & Methods http://ow.ly/qg87O – 9 juillet 2008

Traduit de l’anglais (américain) par AP

» Sommaire de cette série «

Les précédentes tentatives de définition par les agences d’application de la loi et le secteur privé

La recherche d’une définition du renseignement ne se limite pas au domaine de la sécurité nationale. Les entreprises recueillent régulièrement du renseignement sur leurs concurrents et leur environnement économique. Pour leur part, les agences d’application de la loi ont repris un certain nombre d’outils issus du monde du renseignement, qu’elles ont adaptés dans le but de prévenir le crime et d’appréhender les malfaiteurs.

Si le concept de renseignement doit avoir un sens, il lui faut être suffisamment large pour englober non seulement la communauté de la sécurité nationale mais aussi celles du secteur des affaires et des forces de l’ordre. Si l’on ne parvenait pas à établir une telle définition globale, le concept même de renseignement pourrait en souffrir – peut-être fatalement.

Continuer la lecture de « Qu’est-ce que le renseignement ? – 8ème partie »

Lutte contre les sectes – Quand les administrations multiplient les bourdes en justice

sectesL‘administration n’est jamais pire que lorsqu’elle tente à posteriori de justifier un usage abusif de son pouvoir discrétionnaire. Surtout lorsque ses gesticulations se font devant des juges et que son incurie sert les intérêts de grands mouvements sectaires. 

L’actualité judiciaire relativement aux sectes en Europe a connu une semaine chargée. Ainsi, mercredi dernier, en France, la Cour de cassation a entériné la condamnation de l’Église de scientologie pour escroquerie en bande organisée et exercice illégal de la pharmacie. Quelques heures plus tard, en France et aux Pays-Bas, des décisions de justice donnaient en revanche raison à des organisations sectaires, face à l’administration.

Cette conjonction judiciaire met en lumière le fossé qui existe entre :

  • d’une part les façons adéquates de lutter au pénal contre les sectes, qui mènent à des condamnations sérieuses et
  • d’autre part les gesticulations de certaines administrations qui se soldent par un camouflet pour l’appareil étatique.

Continuer la lecture de « Lutte contre les sectes – Quand les administrations multiplient les bourdes en justice »

Les couteaux de poche ne doivent pas être autorisés en cabine. – [3/3]

» Sommaire de cette série «

Une réintroduction pour le moins incohérente

Cet épisode réglementaire sur la réintroduction des couteaux de poche dans les avions aura permis de contempler une nouvelle fois la sureté à géométrie variable de la TSA. Et son manque de vision à moyen terme.

Le 13 mars dernier, en audience devant une commission du Congrès, John Pistole déclarait :

guillemet_john_pistoleUn petit couteau de poche n’aura absolument aucune conséquence désatreuse à bord d’un avion.

A small pocket knife is simply not going to result in the catastrophic failure of an aircraft.

Mais, à une autre occasion, le chef de la TSA expliquait pourquoi les cutters resteraient bannis des avions commerciaux :

guillemet_john_pistoleJ’aimerais que [la nouvelle réglementation] soit aussi simple que possible. [Mais] il y a une trop forte composante émotionnelle  liés aux cutters. C’est pour cette raison qu’ils ne seront pas autorisés.

I wish [the new rule] could be as clean as possible. [But] there’s just too much emotion associated with particularly the box cutters. So those will not be allowed.

Mêlant ainsi décision de principe prétendument rationnelle et exceptions purement émotionnelles, la TSA se prépare des nuits sans sommeil.

Continuer la lecture de « Les couteaux de poche ne doivent pas être autorisés en cabine. – [3/3] »

Les couteaux de poche ne doivent pas être autorisés en cabine. – [2/3]

» Sommaire de cette série «

Un couteau de poche est toujours plus dangereux qu’un lacet de chaussure.

Aviation civileCertes, il existe bien des moyens de faire monter une arme à bord d’un avion de transport commercial. Mais pour assurer la sureté des passagers, bannir les couteaux de poche de la cabine des aéronefs demeure une condition nécessaire et – malheureusement – non suffisante. Mais nécessaire quand même…

C’est suffisamment rare pour que je me permette de le mentionner : je ne partage pas du tout l’avis de l’expert Philip Baum – rédacteur en chef de la revue Aviation Security International – sur le sujet. Dans son dernier éditorial, M. Baum multiplie les erreurs de raisonnement. Ainsi, lorsqu’il écrit :

guillemet_Les couteaux de poche ne sont pas plus dangereux que les mains nues d’un terroriste, ou ses lacets de chaussures, sa ceinture, son stylo ou une flopée d’objets du quotidien qui peuvent être utilisés pour avoir le dessus sur des membres d’équipage ou des passagers.

Pocketknives are no more dangerous than a terrorist’s bare hands, his (or her) shoelaces, belt, pen or a host of everyday items which could be used to overpower crewmembers or passengers.

Dans ce cas, pourquoi les terroristes du 11-Septembre se sont-ils armés de box cutters pour prendre le contrôle des aéronefs ? Pourquoi n’ont-ils pas plutôt utilisé des lacets ou des stylos ?

Continuer la lecture de « Les couteaux de poche ne doivent pas être autorisés en cabine. – [2/3] »

Les couteaux de poche ne doivent pas être autorisés en cabine. – [1/3]

» Sommaire de cette série «

Le principal risque à bord des avions de ligne n’est pas le risque terroriste

Aviation civileSi l’on s’en remet à une véritable analyse du risque de sûreté dans les avions de transport commercial, on constate que le passager perturbateur violent présente un risque bien plus élevé que le terroriste en mission suicide.

Pour justifier sa décision de permettre la réintroduction des couteaux de poche, la TSA argue du fait que les portes de cockpit des avions de ligne ont été renforcées ; ainsi, il n’y aurait plus moyen pour un fou de Dieu armé un canif de réitérer le drame des Twin Towers. Pour la TSA, il conviendrait en revanche de mettre l’accent sur la détection des engins explosifs. Ce faisant, l’administration américaine énonce explicitement que le vrai danger du transport aérien, c’est le terrorisme. La réalité est tout autre.

Il existe en effet un risque bien plus grand que le terrorisme dans les avions de ligne. Un risque qui se réalise tous les jours, quelque part dans le ciel. Ce danger dans l’aviation civile qui devrait éclipser le terrorisme, c’est le passager perturbateur violent, celui qui ne tient pas l’alcool en altitude, celui qui stresse, celui qui n’a pas pris ses médicaments (ou en a pris trop) et qui entre en crise en frappant ceux qui lui demandent de se calmer. Les anglophones désignent cette menace sous le terme air rage. J’utilise pour ma part le vocable accès de fureur en vol. Continuer la lecture de « Les couteaux de poche ne doivent pas être autorisés en cabine. – [1/3] »

Les couteaux de poche ne doivent pas être autorisés en cabine. – [0/3]

Aviation civileSuite à des pressions de politiciens et de professionnels de l’aviation civile, la Transportation Security Administration (TSA) a finalement décidé de maintenir « temporairement » l’interdiction des couteaux de poche dans les cabines des avions de transport commercial. On ne peut que s’en réjouir. « Temporairement ».

Les États-Unis vivent depuis quelques semaines sous le règne du séquestre budgetaire (Budget sequestration), autrement dit des coupes drastiques qui touchent tous les secteurs publics au fédéral. Fin février, l’analyste Justin Hienz estimait :

guillemet_Le sequestre se révèle en fait une opportunité pour la TSA d’abandonner son obstination à vouloir contrôler tous les passagers des lignes aériennes – ce qui exige des ressources et une main d’oeuvre considérables– et de la remplacer par une approche plus efficiente et plus efficace.

Continuer la lecture de « Les couteaux de poche ne doivent pas être autorisés en cabine. – [0/3] »

Protection du périmètre extérieur des aéroports – Un paradoxe

Justin Sullivan - Getty Images

Lorsqu’il s’agit de protéger adéquatement l’aviation civile contre des actes malveillants, les solutions les plus onéreuses sont parfois les moins efficaces. C’est notamment ce que l’on constate avec la vulnérabilité que constitue le périmètre extérieur des aéroports ; une problématique qui s’avère à la fois plus simple et plus complexe qu’il n’y parait.

Aviation civileLa semaine dernière, l’aéroport de Bruxelles a été le théâtre d’un retentissant vol à main armée. Déguisés en policiers, les cambrioleurs bien renseignés – vraisemblablement via une complicité à l’interne – ont préalablement découpé la clôture du périmètre extérieur et, à bord de deux voitures, ont pénétré sur le site aéroportuaire, ont atteint le tablier de l’aéroport et braqué pour 50 millions de dollars en bijoux que l’on venait de monter à bord d’un avion. Ils ont ensuite pris la fuite par le chemin emprunté à l’aller. Le tout en cinq minutes chrono.

Continuer la lecture de « Protection du périmètre extérieur des aéroports – Un paradoxe »

Qu’est-ce que le renseignement ? – 7ème partie

par Kristan Wheaton

Version originale : Sources & Methods
http://ow.ly/h7DVg – 7 juillet 2008

Traduit de l’anglais (américain) par AP

» Sommaire de cette série «

Les précédentes tentatives de définition par les experts

Si le Congrès n’est pas en mesure de fournir une définition utile du renseignement… Si les agences qui font le renseignement ne le peuvent pas non plus… Normalement, les professionnels qui consacrent leur carrière à l’étude et à la pratique de cet art singulier devraient réussir là où les autres ont échoué. Mais ils n’ont eu guère plus de succès.

Continuer la lecture de « Qu’est-ce que le renseignement ? – 7ème partie »

Accès de fureur dans les avions civils – Quel système d’auto-défense pour les membres d’équipage ? – 3ème partie

» Introduction et sommaire de cette série «

Vers un autre paradigme : les techniques de saisie

Si les techniques de combat par frappe sont inappropriées en l’espèce, c’est naturellement vers les disciplines de saisie (grappling) qu’il faut se tourner.

Mais là encore, une sélection sévère s’impose.

Ainsi, par exemple, si l’on pense à l’aïkido, il faut garder à l’esprit que les luxations d’articulation et pressions sur les nerfs – que l’on retrouve d’ailleurs dans bon nombre de disciplines d’auto-défense – ne sont pas efficaces sur des personnes intoxiquées ou sous adrénaline. Par ailleurs, l’aïkido nécessite généralement un espace assez grand pour s’exprimer. L’agent de bord ne doit donc pas espérer placer un kote gaeshi au sortir des toilettes de l’appareil.

Continuer la lecture de « Accès de fureur dans les avions civils – Quel système d’auto-défense pour les membres d’équipage ? – 3ème partie »

Qu’est-ce que le renseignement ? – 6ème partie

par Kristan Wheaton

Version originale : Sources & Methods
http://ow.ly/fVZEq
– 7 juillet 2008

Traduit de l’anglais (américain) par AP

» Sommaire de cette série «

Les précédentes tentatives de définition émanant des agences de renseignement

Peut-être que la façon dont le Congrès définit le renseignement n’a pas d’importance. Peut-être est-ce à dessein que le législateur s’en est tenu à une définition vague. Après tout, ce n’est pas aux députés et aux sénateurs d’effectuer des tâches du renseignement. C’est là le travail d’hommes et de femmes qui appartiennent à des agences spécialisées. De fait, si la loi n’est pas parvenue à énoncer une définition utile et nuancée du renseignement, les gens qui dépensent les 50 milliards de dollars du budget en renseignement devraient quand même avoir une idée claire de ce qu’ils sont censés faire.

Pas si vite.

Continuer la lecture de « Qu’est-ce que le renseignement ? – 6ème partie »