Témoins de Jéhovah et transfusions sanguines – La jeune fille et la mort (6/6)

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6 –  Le rapport du coroner occulte la menace

Le 14 novembre dernier, le coroner Luc Malouin a remis son rapport sur le décès d’Éloïse Dupuis. Ce document officiel vient confirmer ce que l’on savait déjà : la jeune femme est morte des suites de son refus des transfusions sanguines.

Pour le reste, le rapport du coroner est un florilège d’erreurs (6.1), aux regrettables conséquences (6.2), qui détourne l’attention de la vraie problématique : la responsabilité des Témoins de Jéhovah dans cette affaire, notamment au pénal, sur le fondement de l’homicide involontaire coupable (6.3).

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Témoins de Jéhovah et transfusions sanguines – La jeune fille et la mort (5/6)

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5 – Un certain manque de courage du côté de l’hôpital

Contraintes létales sur les adeptes, pressions sur le personnel médical, lobbyisme auprès des autorités,… 

Le refus des transfusions sanguines par l’organisation des Témoins de Jéhovah est la funeste manifestation d’une radicalité religieuse. Les médecins et l’administration des hôpitaux doivent prendre la mesure de l’enjeu. Et agir en conséquence.

Pourquoi l’Hôtel-Dieu de Lévis n’a-t-il pas pris les dispositions médicales et légales qui s’imposaient pour sauver la vie d’Éloïse Dupuis ?

Pour le journaliste Paul Journet, les médecins ont fait tout ce qui était en leur pouvoir :

Depuis les « estrades », on peut penser que les médecins n’en font pas assez pour protéger les patients contre eux-mêmes. Ce serait toutefois oublier qu’ils sont les premiers à être troublés par ces cas désespérants, et aussi qu’ils ont les mains liées par la jurisprudence.

Eh bien, depuis mon estrade, je pense que les médecins n’en ont pas fait assez pour protéger Éloïse Dupuis. Car ce n’était pas d’elle-même qu’il fallait la protéger ; mais de son église.

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Témoins de Jéhovah et transfusions sanguines – La jeune fille et la mort (4/6)

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4 – La responsabilité des Témoins de Jéhovah en tant que groupe

Remettre en cause la légitimité de la mort d’Éloïse Dupuis, c’est estimer que, au-delà de la responsabilité individuelle de la jeune femme,  l’organisation des Témoins de Jéhovah a joué un rôle funeste dans cette affaire. Ce que confirme l’analyse des faits à la lumière du dogme jéhoviste.

De nombreuses voix influentes s’accordent pour dire que la responsabilité de ce drame repose sur les seules épaules de la victime, qui aurait choisi de mourir plutôt que de renier sa religion.

J’estime pour ma part que cette vision erronée nie la dangerosité intrinsèque des Témoins de Jéhovah dans ce genre d’affaires (4.1). Dans le cas d’Éloïse Dupuis, il fallait rechercher la responsabilité du groupe religieux, en relevant les éléments subjectifs (4.2) et objectifs (4.3) de la crainte qu’il a inspirée chez la jeune femme, en exerçant ou en menaçant d’exercer sur elle un abus d’autorité, en vertu de l’article 1403 du Code civil du Québec.

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Témoins de Jéhovah et transfusions sanguines – La jeune fille et la mort (3/6)

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3 – La validité du refus des transfusions

Remettre en cause la légitimité de la mort d’Éloïse Dupuis, c’est se demander si son refus des transfusions sanguines était juridiquement valide.

Sans prétendre à l’exhaustivité, on présentera ici les éléments du droit positif québécois qui auraient dû conduire les médecins, voire un juge, à examiner avec attention le refus de la jeune femme – et à conclure à son invalidité.

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Témoins de Jéhovah et transfusions sanguines – La jeune fille et la mort (2/6)

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2 – La liberté religieuse n’est pas absolue

Si un citoyen s’immole par le feu en place publique pour protester contre la persécution religieuse dont est victime son église, doit-on le regarder brûler jusqu’à ce que mort s’ensuive, sous prétexte qu’il exerce ainsi sa liberté religieuse ?

Si un citoyen s’immole par le feu en place publique pour protester contre la politique fiscale qui a anéanti son entreprise, doit-on le regarder brûler jusqu’à ce que mort s’ensuive, sous prétexte qu’il manifeste ainsi ses convictions politiques ?

Pour une raison que la raison ignore, nombre de commentateurs de l’affaire Éloïse Dupuis répondraient différemment à ces deux questions (cf. article précédent). Il semble en effet que, pour eux, la liberté religieuse s’impose avec une telle force, une telle évidence, qu’ils refusent à l’État toute ingérence en la matière et ce, même lorsque la vie humaine est en jeu.

La liberté religieuse est-elle plus importante que les autres libertés fondamentales ? Échappe-t-elle nécessairement au contrôle de la loi et du juge ?

Non et non, bien évidemment.

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Témoins de Jéhovah et transfusions sanguines – La jeune fille et la mort (1/6)

Les médecins ont-ils le droit de sauver, malgré elle, une Témoin de Jéhovah qui se laisse mourir plutôt que d’accepter une transfusion, après deux chirurgies consécutives qui l’ont vidé de son sang ?

Selon moi, la réponse est OUI. Mais l’explication est complexe.

Retour sur l’affaire Éloïse Dupuis, qui a divisé l’opinion publique au Québec, en octobre dernier.


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  1. Faits, réactions et enjeux
  2. La liberté religieuse n’est pas absolue
  3. La validité du refus des transfusions
  4. La responsabilité des Témoins de Jéhovah en tant que groupe
  5. Un certain manque de courage à l’hôpital
  6. Le rapport du coroner occulte la menace

1 – Faits, réactions et enjeux

Le 6 octobre dernier, Éloïse Dupuis, parturiente de 27 ans, entre à la maison de naissance Mimosa de St-Romuald (Québec) pour mettre au monde son premier enfant. Mais après de longues heures de travail, la sage-femme n’est pas capable de mener l’accouchement à son terme. La future mère est conduite en urgence à l’Hôtel-Dieu de Lévis, à vingt minutes de voiture.

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Protection de l’information : Pour une approche multi-dimensionnelle – et non multi-couche

infosecEn matière de sûreté dans des environnements complexes, il convient de résister à la tentation de multiplier dans l’urgence les protections. Il s’agit plutôt de se concentrer en premier lieu sur un nombre restreint de mesures, afin de parer aux risques les plus importants. Cela est valable aussi bien en sûreté physique qu’en sécurité de l’information, comme nous le montre un cas récent – et grave – de piratage informatique dans le secteur de la santé aux États-Unis.

On apprenait la semaine dernière que le deuxième groupe d’assurances de santé américain, la compagnie Anthem, avait subi une attaque informatique d’envergure. Les pirates auraient en effet eu accès aux informations personnelles de 80 millions (oui, quatre-vingts millions) d’Américains.

Bien que ce ne soit pas le premier événement du genre dans le secteur de la santé, le « hack » d’Anthem semble cette fois avoir constitué un véritable électrochoc. Il est vrai qu’il survient peu après un autre piratage emblématique de l’ampleur du problème, celui de Sony Pictures Entertainment.

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Les zombies sèment la pagaille au ministère de la sécurité publique

Organiser des exercices de mesures d’urgence sur un scénario d’invasion de zombies n’est pas dilapider l’argent du contribuable. C’est une façon intelligente de dynamiser, de motiver et de mieux former les différents intervenants.

Formation par le jeu

La semaine dernière s’est tenu à Québec un colloque organisé sous l’égide du ministère québécois de la sécurité publique au cours duquel on donnait diverses formations en gestion des mesures d’urgence. À l’origine, l’un de ses ateliers devait consister en un exercice de table de 3 jours simulant une invasion de zombies.

Le ministre québécois de la sécurité publique, M. Stéphane Bergeron, s’était insurgé que l’on puisse gaspiller des fonds publics pour monter des projets aussi puérils, en précisant (toutes les occasions sont bonnes) que cette initiative avait été lancée par le précédent gouvernement :

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Moi, sincèrement, si on m’avait posé la question (avant), j’aurais dit : il y a-tu moyen de trouver autre chose… Mais manifestement, il semble que mon prédécesseur était très à l’aise avec la thématique des zombies.

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