Les critères de la secte utilisés par la MIVILUDES : une erreur d’interprétation des travaux de la DCRG

Pour définir ce qu’est une secte, la MIVILUDES recourt à une approche empirique : les fameux critères de dangerosité, issus des travaux de feue la Direction centrale des renseignements généraux (DCRG).

Problème : cette approche repose sur une grossière erreur d’interprétation, commise par une commission parlementaire en 1995 et que personne dans la haute administration n’a jamais cherché à corriger. Autrement dit, depuis plus de quinze ans, la MIVILUDES définit la secte et la dérive sectaire de façon totalement erronée…

Dès 1996, les services du Premier Ministre français considèrent la surveillance des sectes comme une cause nationale. C’est en effet à cette date que l’Hôtel Matignon crée l’Observatoire interministériel sur les sectes. Lequel sera remplacé en 1998 par la Mission interministérielle de lutte contre les sectes (MILS), puis par la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) fin 2002.

Quinze ans plus tard, force est de constater que cette dernière n’a jamais été capable de tenir son rang. La lecture du dernier rapport annuel de la MIVILUDES m’a une nouvelle fois plongé dans des abimes de consternation. Les raisons de se lamenter ne manquent pas. Il serait présomptueux de prétendre toutes les expliquer ici. Toutefois, il est assez facile de donner au lecteur une idée de l’ampleur du problème.

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Une évaluation des risques… sans risque

TerrorismeLe risque est l’éventualité qu’un évènement nuisible se produise dans le futur. Une évaluation du risque terroriste qui s’ajuste principalement en fonction d’évènements passés ne présente aucune pertinence.

Vendredi dernier, le cabinet international Aon, spécialisé dans les assurances et la gestion de risque, a publié son rapport annuel Terrorism and Political Violence Risk Map 2016.

Comme le mentionne le quotidien Les Échos, on est confronté, selon Aon, à une augmentation du risque terroriste global – la première depuis 2013.

Ce constat ne surprendra personne. Mais le problème est ailleurs.

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Présentation sur l’abus de faiblesse à la conférence « Getting Clear », à Toronto

SectesDroitEn juin dernier, s’est tenue à Toronto (Canada), la conférence internationale Getting Clear, consacrée à la Scientologie.

Le panel d’intervenants était impressionnant et je regrette profondément de n’avoir pu assister en personne aux présentations, ni rencontrer bon nombre de personnes dont j’ai découvert les écrits au cours du dernier quart de siècle (déjà…).

Les organisateurs m’avaient demandé de faire une intervention, que j’ai réalisée en vidéo, et qui a été diffusée aux auditeurs le 25 juin.

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Lutte contre les sectes en France – Chronique d’un naufrage annoncé

SectesH ier, le quotidien Libération a consacré cinq pages – dont la une – à la vacillante lutte contre les sectes en France :

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Organismes administratifs moribonds, enquêtes judiciaires qui s’étirent en vain, désintérêt des hautes instances de l’État,… Le constat est amer. Mais il était prévisible.

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La scientologie reconnue comme religion au Royaume-Uni – C’est grave, Docteur ?

SectesDroitLa Cour suprême britannique vient-elle de donner ses lettres de noblesse à une secte multinationale ? Est-ce un blanc-seing accordé aux scientologues pour mener impunément des activités répréhensibles en Grande-Bretagne ? La justice de Sa Majesté a-t-elle abdiqué devant les hordes de Miscavige ?  Non, non et non.

Mercredi dernier, la plus haute juridiction du Royaume-Uni a joliment renvoyé la Ville de Londres dans ses 22 mètres : il est illégal pour l’Officier de l’état-civil londonien de refuser à deux scientologues le droit de se marier religieusement selon les rites de scientologie, sous prétexte que la scientologie ne serait pas une religion – puisque les scientologues ne vouent pas de culte à un dieu.

Dans un précédent billet consacré à cette affaire, j’appelais de mes voeux une décision de la Cour suprême britannique qui viendrait mettre bon ordre à ce salmigondis administrativo-judiciaire. C’est donc chose faite. La scientologie est reconnue comme une religion en Grande-Bretagne. Et c’est normal. Je sais, ça peut surprendre ; mais il est grand temps de se rendre à l’évidence.

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Affaire du tireur parisien – Le profilage criminel a du plomb dans l’aile

TerrorismeLe profilage criminel sied mieux aux séries télévisées américaines qu’à la chronique judiciaire française. C’est ce que m’inspire la lecture d’une analyse livrée par une célèbre criminologue dans l’affaire du tireur parisien. Au programme : grossières erreurs et poncifs édifiants.

Marronnier de la presse, poule aux oeufs d’or des producteurs du grand et du petit écrans, le profilage criminel alimente bien des fantasmes dans la population et chez nombre de chroniqueurs judiciaires. Mais cette ferveur au long cours empêche apparemment de se poser la question qui fâche : le profilage criminel fonctionne-t-il vraiment ?

Si l’on se fie au récent profil livré par une criminologue spécialisée, en plein coeur de l’affaire du tireur parisien, on est en droit d’en douter.

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La DGSI, qu’est-ce que c’est ? Une réforme ? – Non, Sire, une révolution.

Théorie du renseignementLe plan de réorganisation du renseignement intérieur français de Manuel Valls n’est pas une énième réforme. C’est à la fois la prise de la Bastille et la Nuit du 4 août.

DCRI

En 2008, la réforme du renseignement voulue par Nicolas Sarkozy se réalisait avec la création de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), fusionnant la Direction de la surveillance du territoire (DST) et la Direction centrale des renseignements généraux (DCRG).

Une partie des fonctionnaires des RG étaient alors, à leur grand dam, reversés en sécurité publique, dans la nouvelle Sous-direction de l’information générale (SDIG).

Une affaire Merah et quelques rapports parlementaires plus tard, l’actuel ministre de l’Intérieur vient de présenter son plan de réorganisation du renseignement intérieur. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce n’est pas qu’«une réforme de plus.»

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Un vice de procédure via ce blogue ? L’Église de scientologie parisienne aura vraiment tout essayé…

Condamnée lourdement par la Cour d’appel de Paris en février dernier, l’Église de scientologie parisienne fait feu de tout bois pour obtenir l’annulation de l’ensemble de la procédure devant la Cour de cassation. Dernière tentative en ce sens : l’église se réfère expressément à un article de ce blogue et l’élève au rang de preuve formelle d’un vice de procédure. Mais l’argumentaire fait long feu, tant il est éloigné de la réalité.

Ainsi, mercredi 2 mai, devant les locaux de l’antenne parisienne de l’École nationale de la magistrature (ÉNM), s’est tenue une manifestation organisée par l’Église de scientologie locale. Il s’agissait pour l’organisation de dénoncer un récurrent séminaire de formation organisé en collaboration avec la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) à destination des magistrats. Voilà près de quinze ans que l’ÉNM accueille une telle initiative. Et l’Église de scientologie a coutume de la dénoncer.

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10 ans après, ma thèse sur la Scientologie est confirmée par la Cour d’appel de Paris

ou

La revanche d’un paria du renseignement
sur la haute administration française

Jeudi dernier, le 2 février 2012, la Cour d’appel de Paris a confirmé un jugement de première instance et a condamné deux organisations parisiennes de scientologie en tant que personnes morales pour escroquerie aggravée en bande organisée, de par l’utilisation d’un test de personnalité en vue de persuader frauduleusement les victimes d’acheter des produits et services de scientologie. La Cour a prononcé des amendes d’un montant total de 600.000 € – près d’1M$ canadiens. Il s’agit de la sanction la plus sévère jamais prononcée pour escroquerie contre une organisation en France.

Revenons en arrière de très exactement dix ans (et quelques heures). Le 1er février 2002, à l’Université de Cergy-Pontoise, je soutiens ma thèse de doctorat en droit criminel, consacrée à l’Église de scientologie. En recourant uniquement à des sources ouvertes, j’y développe notamment les idées selon lesquelles il convient :

  • de poursuivre les organisations de scientologie de France, notamment sur le fondement de l’escroquerie aggravée en bande organisée
  • et de rechercher systématiquement la responsabilité pénale de la personne morale impliquée

notamment en raison de l’utilisation du test de personnalité aux fins de persuader frauduleusement les victimes d’acheter des produits et services de scientologie.

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Délit d’abus de faiblesse : la Mission antisectes française part à la dérive

Ce n’est pas de l’acharnement mais bien plutôt l’actualité qui m’amène à consacrer un second article critique à l’encontre de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), quelques jours à peine après celui-ci.

En septembre dernier, le Ministère de la Justice français, assisté de la Miviludes, a publié une nouvelle circulaire sur les sectes (une de plus !) à destination des magistrats. Ce n’est pas un hasard du calendrier : nous entrons présentement dans le procès en appel de deux organisations de scientologie condamnées en première instance à Paris, en 2009.

Ce procès est exemplaire : il a abouti au prononcé d’amendes pénales très élevées mais surtout à des condamnations d’entités de la Scientologie en tant que de personnes morales pour escroquerie aggravée en bande organisée. Une première.

Croyiez-vous que la Miviludes allait capitaliser sur ce succès en passe d’être confirmé en appel ? Pensiez-vous que la Chancellerie allait œuvrer pour rappeler aux magistrats tout l’intérêt de recourir, en matière sectaire, à des incriminations claires, bien établies en jurisprudence, telles que l’escroquerie ?

Que nenni. Les deux institutions ont préféré mettre en avant, pour la énième fois, l’abus de faiblesse de l’article 223-15-2 du Code pénal. Il s’agit pourtant d’un chef d’accusation qui n’a jamais rien donné devant les tribunaux en termes de lutte contre les sectes. Continuer la lecture de « Délit d’abus de faiblesse : la Mission antisectes française part à la dérive »