La loi américaine sur les armes à feu indétectables rate sa cible | 1/3

Introduction et sommaire de cette série

Aviation civile1ère partie – Une loi obsolète

Depuis 1988, l’article 922, paragraphe (p) de l’United States Code
est ainsi rédigé :

guillemet_loi2(1) It shall be unlawful for any person to manufacture, import, sell, ship, deliver, possess, transfer, or receive any firearm—

(A) that, after removal of grips, stocks, and magazines, is not as detectable as the Security Exemplar, by walk-through metal detectors calibrated and operated to detect the Security Exemplar; or

(B) any major component of which, when subjected to inspection by the types of x-ray machines commonly used at airports, does not generate an image that accurately depicts the shape of the component (…)

(2) For purposes of this subsection—

(A) the term “firearm” does not include the frame or receiver of any such weapon;

(B) the term “major component” means, with respect to a firearm, the barrel, the slide or cylinder, or the frame or receiver of the firearm; and

(C) the term “Security Exemplar” means an object, to be fabricated at the direction of the Attorney General, that is—

(i) constructed of, during the 12-month period beginning on the date of the enactment of this subsection, 3.7 ounces of material type 17–4 PH stainless steel in a shape resembling a handgun; and

(ii) suitable for testing and calibrating metal detectors. (…)

Certes, depuis l’entrée en vigueur de la loi, les modèles d’armes à feu en polymère se sont multipliés. Mais nous n’avons assisté à aucune prise de contrôle d’aéronef par des pirates de l’air armés exclusivement de Glock ou de Steyr-M. Ce n’est pas à la loi américaine sur les armes à feu indétectables qu’on le doit, mais bien plutôt au fait que ces pistolets demeurent des armes chères et relativement difficiles à se procurer. Mais surtout, contrairement à la rumeur, ces pistolets ne sont pas indétectables. Devant les mesures de sureté aux aéroports, il s’agit d’armes à feu comme les autres.

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La loi américaine sur les armes à feu indétectables rate sa cible | 0/3

Aviation civileIntroduction

Cette semaine, le Congrès américain a reconduit à l’identique, pour dix ans, la loi prohibant les armes indétectables (Undetectable Firearms Act), votée en 1988 pour une durée déterminée – et régulièrement renouvelée depuis.

À l’origine, ce texte avait pour objectif d’empêcher d’éventuels terroristes d’introduire de telles armes à bord des avions de ligne pour en prendre le contrôle. Des fabricants d’armes tels que Steyr Mannlicher et Glock avaient en effet produit des pistolets en polymère. Selon la rumeur – alimentée par une fameuse (et malencontreuse) réplique de Bruce Willis dans Die Hard 2 -, ces armes pourraient tromper les systèmes traditionnels de détection.

guillemet_mcclaneThat punk pulled a Glock 7 on me. You know what that is? It’s a porcelain gun made in Germany. Doesn’t show up on your airport X-ray machines, here, and it cost more than you make in a month.

Bien que les preuves formelles de cette assertion fassent défaut, les pouvoirs publics américains ont pris la chose très au sérieux. Et les attentats du 11-Septembre n’ont rien fait pour les rasséréner.

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Bricoleur Folamour

ou

Comment j’ai appris à ne plus m’en faire
et à ignorer la bombe ultra-artisanale
dans les avions de ligne

TerrorismeAviation civileLe site Internet Terminal Cornucopia explique par le menu comment fabriquer en quelques minutes des armes et explosifs à partir de produits disponibles dans les magasins hors taxes des aéroports. Doit-on pour autant craindre de voir déferler sur l’aviation civile une horde de terroristes cheap-and-geek, disciples de MacGyver ? Non.

Je croyais l’affaire entendue. Depuis quelques mois déjà. Mais non. Il a suffi que la presse ressorte de ses étagères numériques un site Internet pour que certains responsables de la sureté dans les aéroports canadiens se remettent à frémir.

À l’origine du récent malaise, un article du Daily Mail (Royaume-Uni) consacré au site Internet Terminal Cornucopia. Son fondateur, Evan Booth, est un jeune développeur web américain qui se passionne pour la sécurité physique. Amateur de crochetage de serrures, il s’intéresse également à la sureté de l’aviation civile et dénonce à sa manière l’incohérence des mesures de sureté imposées dans les aéroports : il publie des vidéos de démonstration et d’instructions de montage pour des armes et des explosifs ultra-artisanaux. Pourquoi ultra-artisanaux ? Parce qu’ils peuvent être – plus ou moins – aisément construits à partir d’objets usuels en vente libre dans les jetées aéroportuaires – comprenez : après les contrôles de sureté.

Les vidéos de Terminal Cornucopia font leur effet : ça explose, ça flashe et ça pétarade à tous les étages. À tel point que d’aucuns s’inquiétent : et si des terroristes tombaient sur de telles vidéos ?! Mauvaise question : lesdits terroristes sont déjà tombés dessus. Doit-on pour autant paniquer ? Je ne le pense pas. Et ce, pour trois raisons.

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Affaire du tireur parisien – Le profilage criminel a du plomb dans l’aile

TerrorismeLe profilage criminel sied mieux aux séries télévisées américaines qu’à la chronique judiciaire française. C’est ce que m’inspire la lecture d’une analyse livrée par une célèbre criminologue dans l’affaire du tireur parisien. Au programme : grossières erreurs et poncifs édifiants.

Marronnier de la presse, poule aux oeufs d’or des producteurs du grand et du petit écrans, le profilage criminel alimente bien des fantasmes dans la population et chez nombre de chroniqueurs judiciaires. Mais cette ferveur au long cours empêche apparemment de se poser la question qui fâche : le profilage criminel fonctionne-t-il vraiment ?

Si l’on se fie au récent profil livré par une criminologue spécialisée, en plein coeur de l’affaire du tireur parisien, on est en droit d’en douter.

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Les couteaux de poche ne doivent pas être autorisés en cabine. – [2/3]

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Un couteau de poche est toujours plus dangereux qu’un lacet de chaussure.

Aviation civileCertes, il existe bien des moyens de faire monter une arme à bord d’un avion de transport commercial. Mais pour assurer la sureté des passagers, bannir les couteaux de poche de la cabine des aéronefs demeure une condition nécessaire et – malheureusement – non suffisante. Mais nécessaire quand même…

C’est suffisamment rare pour que je me permette de le mentionner : je ne partage pas du tout l’avis de l’expert Philip Baum – rédacteur en chef de la revue Aviation Security International – sur le sujet. Dans son dernier éditorial, M. Baum multiplie les erreurs de raisonnement. Ainsi, lorsqu’il écrit :

guillemet_Les couteaux de poche ne sont pas plus dangereux que les mains nues d’un terroriste, ou ses lacets de chaussures, sa ceinture, son stylo ou une flopée d’objets du quotidien qui peuvent être utilisés pour avoir le dessus sur des membres d’équipage ou des passagers.

Pocketknives are no more dangerous than a terrorist’s bare hands, his (or her) shoelaces, belt, pen or a host of everyday items which could be used to overpower crewmembers or passengers.

Dans ce cas, pourquoi les terroristes du 11-Septembre se sont-ils armés de box cutters pour prendre le contrôle des aéronefs ? Pourquoi n’ont-ils pas plutôt utilisé des lacets ou des stylos ?

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Israël : La chasse aux terroristes idiots est ouverte

TerrorismeÀ l’aéroport Ben-Gourion de Tel Aviv, le service de sécurité intérieure (Shin Bet) peut demander aux arrivants d’ouvrir leur compte courriel. Les passagers sont ensuite inviter à laisser les agents israéliens lire le contenu des messages électroniques, pour déterminer si ceux-ci contiennent des éléments de nature à nuire directement ou non à Israël. Si les passagers refusent ce contrôle, ils peuvent se voir refuser l’entrée au pays.

Israel HayomLe FigaroFrance TV InfoCNN

Shin Bet et courriels

 Illustration réalisée avec le logiciel en ligne GéGé.

Pour un autre exemple de Cover Your Ass bureaucratique au sein de la haute administration israélienne, on pourra relire cet article.

Les couteaux de poche ne doivent pas être autorisés en cabine. – [1/3]

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Le principal risque à bord des avions de ligne n’est pas le risque terroriste

Aviation civileSi l’on s’en remet à une véritable analyse du risque de sûreté dans les avions de transport commercial, on constate que le passager perturbateur violent présente un risque bien plus élevé que le terroriste en mission suicide.

Pour justifier sa décision de permettre la réintroduction des couteaux de poche, la TSA argue du fait que les portes de cockpit des avions de ligne ont été renforcées ; ainsi, il n’y aurait plus moyen pour un fou de Dieu armé un canif de réitérer le drame des Twin Towers. Pour la TSA, il conviendrait en revanche de mettre l’accent sur la détection des engins explosifs. Ce faisant, l’administration américaine énonce explicitement que le vrai danger du transport aérien, c’est le terrorisme. La réalité est tout autre.

Il existe en effet un risque bien plus grand que le terrorisme dans les avions de ligne. Un risque qui se réalise tous les jours, quelque part dans le ciel. Ce danger dans l’aviation civile qui devrait éclipser le terrorisme, c’est le passager perturbateur violent, celui qui ne tient pas l’alcool en altitude, celui qui stresse, celui qui n’a pas pris ses médicaments (ou en a pris trop) et qui entre en crise en frappant ceux qui lui demandent de se calmer. Les anglophones désignent cette menace sous le terme air rage. J’utilise pour ma part le vocable accès de fureur en vol. Continuer la lecture de « Les couteaux de poche ne doivent pas être autorisés en cabine. – [1/3] »

Les zombies sèment la pagaille au ministère de la sécurité publique

Organiser des exercices de mesures d’urgence sur un scénario d’invasion de zombies n’est pas dilapider l’argent du contribuable. C’est une façon intelligente de dynamiser, de motiver et de mieux former les différents intervenants.

Formation par le jeu

La semaine dernière s’est tenu à Québec un colloque organisé sous l’égide du ministère québécois de la sécurité publique au cours duquel on donnait diverses formations en gestion des mesures d’urgence. À l’origine, l’un de ses ateliers devait consister en un exercice de table de 3 jours simulant une invasion de zombies.

Le ministre québécois de la sécurité publique, M. Stéphane Bergeron, s’était insurgé que l’on puisse gaspiller des fonds publics pour monter des projets aussi puérils, en précisant (toutes les occasions sont bonnes) que cette initiative avait été lancée par le précédent gouvernement :

guillemet_

Moi, sincèrement, si on m’avait posé la question (avant), j’aurais dit : il y a-tu moyen de trouver autre chose… Mais manifestement, il semble que mon prédécesseur était très à l’aise avec la thématique des zombies.

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Un « expert » en terrorisme oublie ce qu’est le terrorisme

Quoi que puisse en dire l’ancien président d’un célèbre groupe de réflexion canadien, le terrorisme est d’abord une question de violence grave aux personnes. Si cet élément fait défaut, l’activisme politique, aussi perturbateur soit-il, ne relève pas du terrorisme.

Le Canada connait depuis des semaines un conflit sociétal d’envergure dans le dossier des droits des communautés autochtones. Désigné sous l’appellation générique Idle No More, il vise à faire pression sur le gouvernement fédéral pour qu’il revienne sur la loi C-45 dont certaines dispositions remettent en cause des droits acquis des Premières Nations.

Dans le cadre de cette contestation pancanadienne, le 5 janvier dernier, un groupe d’autochtones s’était rassemblé sur une voie ferrée du Canadien National (CN) près de Belleville (Ontario). Ils avaient activé un signal de passage à niveau, allumé un feu sur la voie et occupé les lieux, pour empêcher les trains de passer.

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Qu’est-ce que le renseignement ? – 6ème partie

par Kristan Wheaton

Version originale : Sources & Methods
http://ow.ly/fVZEq
– 7 juillet 2008

Traduit de l’anglais (américain) par AP

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Les précédentes tentatives de définition émanant des agences de renseignement

Peut-être que la façon dont le Congrès définit le renseignement n’a pas d’importance. Peut-être est-ce à dessein que le législateur s’en est tenu à une définition vague. Après tout, ce n’est pas aux députés et aux sénateurs d’effectuer des tâches du renseignement. C’est là le travail d’hommes et de femmes qui appartiennent à des agences spécialisées. De fait, si la loi n’est pas parvenue à énoncer une définition utile et nuancée du renseignement, les gens qui dépensent les 50 milliards de dollars du budget en renseignement devraient quand même avoir une idée claire de ce qu’ils sont censés faire.

Pas si vite.

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